Santé
« Nous avons étudié 88 facteurs externes pour lesquels il y avait une suspicion de préjudice »
Une importante étude de synthèse rassemble les connaissances sur les principaux facteurs externes ayant un impact potentiel sur la santé des enfants. Rémy Slama, directeur de recherche à l’Inserm et co-auteur de ces travaux, résume les principales conclusions.
PFOA dans les vieux poêles, particules fines dans l’atmosphère, UV du soleil,… autant de composés présents dans notre environnement qui peuvent influencer notre santé. Une grande étude franco-européenne publié dans la revue Revue internationale d’hygiène et de santé environnementale fait le point sur 88 de ces éléments potentiellement nocifs, regroupés sous le terme d’exposome. Rémy Slama, directeur de recherche à l’Inserm et l’un des auteurs de ces travaux, explique à Figaro les enjeux de ce sujet.
LE FIGARO – Qu’est-ce que l’exposome, et pourquoi est-ce un sujet important ?
Rémy PAILLE. – L’exposome désigne tous les facteurs extérieurs éventuellement en contact avec un être humain. Ces facteurs peuvent influencer positivement ou négativement le développement d’un être humain depuis sa conception jusqu’à la fin de sa vie, tout comme nos gènes. Parallèlement, certains facteurs de l’exposome peuvent influencer le génome, l’ensemble des gènes d’un individu. Par exemple, les rayonnements ionisants ou le benzène peuvent induire des cassures ou des mutations dans l’ADN, d’autres facteurs peuvent influencer l’expression de nos gènes. Et symétriquement, nos gènes influencent notre capacité à vivre avec les facteurs environnementaux et éventuellement à y résister.
Quels facteurs entrent dans cette définition ?
A priori, tous les facteurs chimiques, physiques, psychosociaux, biologiques (comme les agents infectieux). Les agents physiques comprennent les rayons UV du soleil qui peuvent être bénéfiques pour la production de vitamine D, mais qui augmentent également le risque de cancer de la peau. Les PM 2,5 (particules atmosphériques de moins de 2,5 micromètres de diamètre) émises par les moteurs thermiques et autres processus de combustion font également partie de notre exposition. Il y a beaucoup de facteurs. Nous en avons étudié en 88, pour lesquels il y avait souvent des soupçons quant à leur nocivité.
Lequel de ces 88 facteurs est le plus dangereux ?
Nous avons classé les facteurs selon le nombre de pathologies infantiles qu’ils sont susceptibles d’induire ; cela revient à lister tous les dangers associés à chaque facteur. Dans le premier quatuor on retrouve les polychlorobiphényles (PCB), composés interdits depuis 1987 en France, que l’on retrouve dans un grand nombre d’applications (électricité, fours à micro-ondes, adhésifs, peintures). Malheureusement, malgré l’interdiction, ils persistent dans l’environnement, ce qui explique pourquoi les enquêtes de biosurveillance les retrouvent dans le corps de la majorité de la population. L’hexachlorobenzène (HCB), interdit en Europe depuis 1981, était utilisé comme fongicide. L’acide perfluorooctanoïque (PFAO), interdit en 2020 en Europe, a notamment été retrouvé dans le Téflon des poêles à frire.
Quelle a été votre méthode pour déterminer le danger de chaque facteur présent dans l’exposome ?
Pour chaque facteur nous avons étudié les dangers qu’il représente sur le système cardiovasculaire, le métabolisme, le développement neuronal, le système respiratoire ou encore le reste du corps de l’enfant. Nous nous sommes appuyés sur toute la littérature scientifique, humaine, animale et in vitro. Chaque facteur de l’exposome peut induire plusieurs effets, pour chacun de ces effets nous avons quantifié son niveau de preuve dans les études allant d’un effet « probable » à « très probable ». Par exemple, le PFOA peut probablement induire au moins 7 types différents de pathologies (respiratoires, métaboliques, neurodéveloppementales, etc.), le bisphénol A quatre. Dans notre étude, nous avons établi le niveau de preuve associé à l’effet éventuel sur la santé de chaque facteur : par exemple, le niveau de preuve était plus faible pour un effet observé uniquement chez l’animal que pour un effet retrouvé à la fois chez l’animal et chez l’humain.
Pourquoi de plus en plus d’études se penchent sur ce sujet ?
Une grande partie de la population est exposée à de nombreux facteurs. Avec cette étude, nous rendons plus visible une préoccupation de tous : comment notre mode de vie peut influencer notre propre santé, comme l’air respiré, la nourriture consommée ou les produits cosmétiques ? Nous avons compris, après d’importants efforts de recherche, que le génome est loin d’expliquer la survenue de la plupart des cas de maladies chroniques. Et il est bien plus facile d’agir sur l’environnement que sur nos gènes.
L’impact de nombreux produits présents dans l’environnement, comme le glyphosate, fait l’objet de polémiques. Comment gérez-vous ce type de problème ?
Les scientifiques ont tendance à être prudents et à ne considérer un lien de causalité établi entre un facteur et une maladie que lorsqu’il existe des études répétées. Nous avons réalisé un travail de « synthèse des synthèses », c’est-à-dire que nous nous sommes appuyés sur des études qui avaient déjà synthétisé des études individuelles sur un facteur donné. L’avantage est que nos données ont un haut degré de fiabilité, l’inconvénient est qu’il nous manque probablement des substances moins étudiées.
Pourquoi étiez-vous limité à 88 facteurs ?
Nous n’avons pas de machine magique pour affirmer rapidement qu’un composé exposé est dangereux ou non. Si l’on veut avoir une vision globale, il faut mettre en place un long processus. Les recherches sur ce sujet sont plus récentes et bien moins financées que celles sur le génome. Avec davantage de ressources, il serait possible d’étendre ces travaux à davantage de composés et également d’envisager leurs effets à d’autres âges de la vie, chez l’adulte.
Certains parlent d’un effet cocktail, où la combinaison de plusieurs facteurs aurait un impact négatif bien plus important que la simple addition des facteurs. Avez-vous étudié cet effet ?
Nous n’avons pas traité spécifiquement deeffet cocktail, c’est-à-dire la synergie qui fait qu’une substance potentialise fortement l’effet d’une autre. Cependant, le consensus toxicologique est que cet effet n’est pas si courant. A l’inverse, il existe un effet d’accumulation : plus un individu est soumis à un nombre élevé de facteurs, plus le risque sanitaire augmente.
Face à la diversité de ces composés, quels conseils pouvez-vous nous donner pour préserver notre santé ?
La pression des consommateurs sur les entreprises et les décideurs pourrait permettre davantage de transparence. Il faut que ces substances dangereuses soient visibles sur les produits que nous consommons. Inspiré du label des peintures actuelles sur les « émissions de composés organiques volatils (COV) dans l’air intérieur » entre A+ et C, ou encore du « Nutri-Score », un « toxi-score » serait un outil de signalisation simple qui mérite d’être être implémenté. Certaines applications pour smartphone proposent de tels scores aux consommateurs, mais il serait pertinent qu’il existe un score « officiel » produit de manière totalement indépendante et basé sur les connaissances de la recherche.
La loi nous protège-t-elle de l’exposome ?
La loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé précise que « l’identification de ces déterminants [de la santé de la population, NDLR] est basé sur le concept d’exposome. Santé publique France et l’Anses ont mis en œuvre cette loi avec de grandes études de biosurveillance qui documentent l’exposition d’une grande partie de la population à de nombreuses substances. Mais il manque des travaux pour mieux comprendre les mécanismes d’action, les effets et les risques sur la santé, ainsi que les moyens de limiter l’exposition. Et les moyens pour étudier ces questions ne sont pas à la hauteur du nombre de substances et des effets possibles. Depuis deux ans, l’Inserm propose un programme vaste et ambitieux sur l’exposome, en cohérence avec le plan santé environnement, mais il n’est pas encore financé.
Comment allez-vous poursuivre votre travail collectif ?
Nous avons jusqu’à présent dressé un tableau des dangers liés à l’exposome pour la santé des enfants. Il s’agit ensuite de passer au « risque », c’est-à-dire au nombre d’années de bonne santé perdues du fait de l’exposition à chacun des facteurs étudiés. Pour ce faire, nous poursuivons notre étude en synthétisant les relations dose-réponse pour chaque composé de l’exposome et les données d’exposition, ce qui permettra d’estimer le nombre d’années de vie en bonne santé perdues.
Santé
Sida : malgré sa gratuité en pharmacie, les jeunes abandonnent le préservatif pour des raisons financières
De plus en plus de jeunes n’utilisent pas de préservatifs lors des relations sexuelles en raison de contraintes financières. Toutefois, les préservatifs sont gratuits en pharmacie pour les moins de 26 ans en pharmacie. Un dispositif qui existe depuis janvier 2023 mais qui reste encore mal connu.
Ce sont des chiffres « inquiétants » pour le Sidaction : 64% des jeunes déclarant au moins un rapport sexuel dans l’année n’ont pas utilisé de préservatif selon une étude de l’association de lutte contre le sida publiée ce lundi, à quelques jours du Week-end Sidaction. (22, 23 et 24 mars) qui marquera les 30 ans de la création de l’association. Et parmi ceux qui n’utilisaient pas de préservatif, seuls 36 % faisaient un test de dépistage du VIH avant d’avoir des relations sexuelles.
Pour expliquer l’absence de préservatifs, de plus en plus de jeunes invoquent des raisons financières : 13% expliquent le non-utilisation de la protection par le prix, contre 5% en 2018 alors même que la gratuité est garantie pour les préservatifs. moins de 26 ans en pharmacie.
Mais pour certains, présenter sa carte Vitale au pharmacien est un acte trop formel même si cela évite de payer une dizaine d’euros la boîte : « On a un peu honte de demander, on préfère les caisses automatiques », avoue au micro de RMC un étudiant.
« Nous sommes tenus au secret médical » rappelle Eric Myon, secrétaire général du Syndicat national des pharmacies de France. « Quand je regarde les sorties de préservatifs soutenues, nous sommes à moins d’une boîte par jour. C’est trop peu quand on a plusieurs jeunes qui passent chaque jour et qui pourraient être sensibilisés. Il serait logique qu’«on puisse en distribuer un peu plus pour assurer une bonne prévention», estime-t-il.
« Nous manquons d’informations »
Il faut communiquer davantage, estime Florence Thune, directrice générale du Sidaction : « Il faut vraiment compléter cette évolution de la gratuité par un arsenal d’autres mesures, qui c’est rappeler que cette épidémie est toujours là. Les jeunes nous disent que ils ne s’inquiètent pas de la fin du VIH, c’est pourquoi ils n’utilisent évidemment pas de préservatifs », déplore-t-elle.
« Nous manquons d’informations, il n’est plus possible que les jeunes d’aujourd’hui ne sachent pas où aller pour se faire tester », prévient Florence Thune.
5 000 personnes découvrent leur séropositivité chaque année en France. «C’est toujours trop», dit-elle.
Depuis janvier 2023, les préservatifs sont gratuits en pharmacie pour les moins de 26 ans, sur simple présentation d’une carte Vitale voire d’une carte d’identité.
Pour faire un don à Sidaction : appelez le 110 ou rendez-vous sur le site Internet sidaction.org
Santé
Des médecins cubains à Guingamp pour sauver l’hôpital public ? L’ARS donne son feu vert
L’Agence régionale de santé (ARS) de Bretagne n’est pas opposée à l’arrivée de médecins cubains dans les Côtes-d’Armor, selon le président de l’agglomération Guingamp-Paimpol, Vincent Le Meaux. Ce dernier aura également rendez-vous au ministère de la Santé le 28 mars.
Ce projet serait une première en France. Ce lundi 18 mars, Vincent Le Meaux, président de l’agglomération Guingamp-Paimpol, a déclaré sur RMC que rien ne s’opposait à l’arrivée de médecins cubains dans les Côtes-d’Armor.
« Ils sont prêts sous le régime Padhue (praticiens qualifiés hors UE, ndlr), ce qui fait que ces médecins relèveraient du statut français d’interne en médecine. Vient ensuite une certification de deux ans », explique-t-il à RMC.
« Cela a été confirmé par l’ARS. Maintenant, le ministère doit nous confirmer la procédure. Interrogée, l’Agence régionale de santé de Bretagne n’a pas encore répondu.
« Les praticiens cubains, comme tous les praticiens diplômés hors Union européenne (Padhue), sont bien sûr les bienvenus à condition qu’ils s’engagent dans une procédure d’autorisation d’exercice », précise toutefois l’ARS Bretagne à Ouest de la France le 11 mars.
Par ailleurs, le président de l’ordre des médecins des Côtes-d’Armor s’oppose farouchement au projet, défendant sa profession.
Rendez-vous le 28 mars au Ministère de la Santé
Pour rappel, des élus locaux, des syndicats, des représentants des médecins ainsi que le comité de défense de l’hôpital et le directeur de l’hôpital ont discuté de cette collaboration avec l’ambassadeur cubain en France, Otto Vaillant, il y a un mois.
L’agglomération de Guingamp-Paimpol avait invité le diplomate, car elle était consciente de « la possibilité d’envoyer des médecins cubains à travers le monde pour aider aussi bien dans l’urgence que dans la durée », a expliqué son président Vincent Le Meaux lors d’une conférence de presse à l’issue de cette rencontre. , évoquant « un besoin de santé sur nos territoires ».
« Si Cuba peut nous aider, ce sera très bien », a-t-il poursuivi.
« Nous aimerions tout d’abord faire venir des obstétriciens et des sages-femmes, car notre maternité est suspendue depuis plusieurs mois et c’est vraiment indiciblement triste », a ajouté Virginie Le Thuaut, co-secrétaire de la CGT à l’hôpital de Guingamp.
« Il y a encore des accouchements au bord des routes depuis la suspension de la maternité… », déplore-t-elle.
Et pour cause, la maternité de Guingamp, menacée de fermeture depuis des années, a obtenu un sursis en 2018 à la demande d’Emmanuel Macron, après une forte mobilisation de la population. Mais depuis avril 2023, les livraisons y sont suspendues, faute de personnel soignant en nombre suffisant.
Pour concrétiser ce projet, le président de la communauté se réunit le 28 mars au ministère de la Santé. À suivre.
Santé
Les secrets diététiques des meilleurs sportifs français
Réservé aux abonnés
ENQUÊTE – Au centre de formation très performant de l’Insep, la nutrition est une affaire très sérieuse. Le Figaro regardé ce qui se passait dans les assiettes des champions.
«Comment manger équilibré lorsque vous êtes en déplacement ? Comment éviter les collations déséquilibrées en salle de sport pendant les compétitions ? » Charline Courtois, diététicienne, interpelle la dizaine de personnes très attentives qui se trouvent devant elle. Ce soir, un entraînement collectif s’adresse aux tireurs de l’Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance (Insep). Il faut trouver des solutions adaptées à ces sportifs, qui voyagent souvent à l’étranger et qui, du fait des compétitions qui durent toute la journée, se nourrissent avec ce qu’ils trouvent sur place. « On ne peut pas dire que le sandwich jambon-beurre soit très adapté. Nous leur suggérons donc de faire appel aux plats lyophilisés. Ils sont faciles à transporter et permettent d’avoir une alimentation équilibrée. Il suffit d’une bouilloire et d’eau pour les reconstituer sur place. » explique Charline Courtois.
La rédaction vous conseille